Comment le revêtement de la langue aide à identifier précocement la maladie de Parkinson

En analysant ce qui se trouve à la surface de la langue, les scientifiques ont découvert des indices puissants pour détecter la maladie de Parkinson: pas d'injections, pas de scanners - juste un simple prélèvement.

Des chercheurs de la faculté de médecine de l'université Jiao Tong de Shanghai, en Chine, ont exploré le potentiel diagnostique des échantillons de revêtement lingual pour la détection précoce et le suivi de la maladie de Parkinson. Dans leur étude, publiée dans Frontiers in Microbiology, les échantillons de revêtement lingual se sont révélés un outil diagnostique prometteur pour la maladie, soulignant l'implication des communautés microbiennes et des composés métaboliques dans la pathogenèse.

Introduction

La maladie de Parkinson est la deuxième maladie neurodégénérative la plus fréquente. Elle se caractérise par des tremblements de repos, une rigidité musculaire et une lenteur des mouvements. Dans les pays à revenu élevé, son incidence est d'environ 14 cas pour 100 000 personnes.

La pathogénèse est associée à un dysfonctionnement mitochondrial, un stress oxydatif, une agrégation protéique, une altération de l'autophagie et une neuroinflammation. Cette complexité limite les options diagnostiques et thérapeutiques.

Les méthodes de diagnostic traditionnelles nécessitent la collecte de liquide céphalo-rachidien ou de sang, qui sont des procédures invasives pouvant entraîner un stress psycho-émotionnel, un fardeau financier et un risque d’infection, et qui sont également coûteuses et associées à des protocoles complexes.

Ces lacunes soulignent la nécessité de développer des méthodes de diagnostic plus pratiques, plus précises et plus précoces. Cette étude a été conçue dans ce but. L'idée est née lorsque des scientifiques ont observé un enduit lingual caractéristique chez des patients atteints de la maladie de Parkinson: une couche épaisse et grasse, parfois d'une teinte blanche ou jaune anormale.

L'enduit lingual est un élément important du diagnostic visuel en médecine traditionnelle chinoise. Il contient généralement un mélange de bactéries, de cellules épithéliales, de salive, de métabolites sanguins et de débris alimentaires.

L'analyse du revêtement de la langue suscite une attention croissante dans le domaine biomédical et est utilisée pour diagnostiquer les maladies bucco-dentaires, les maladies gastro-intestinales et de nombreuses autres affections.

Compte tenu de la simplicité, du caractère non invasif, du faible risque et de la rentabilité du prélèvement de langue, des chercheurs de l'Université Jiaotong de Shanghai ont mené une analyse compositionnelle pour améliorer le diagnostic et le pronostic de la maladie de Parkinson.

Méthodologie

Les scientifiques ont effectué une analyse quantitative du microbiome et des composés métaboliques dans des échantillons de plaque linguale provenant de 36 patients atteints de la maladie de Parkinson et de 31 individus en bonne santé.

En intégrant les données du microbiome et de la métabolomique, ils ont cherché à identifier des biomarqueurs fiables pouvant servir d'outils de diagnostic non invasifs et identifier de nouvelles cibles thérapeutiques. Pour évaluer la valeur prédictive des marqueurs identifiés, un modèle d'apprentissage automatique de type « forêt aléatoire » a été utilisé.

Résultats clés

• Microbiome: L’analyse des plaques a révélé des différences significatives dans l’abondance relative de plusieurs communautés bactériennes entre les patients et les témoins sains, notamment les Firmicutes, les Bacteroidetes et les Actinobacteria. Ces communautés pourraient servir de marqueurs potentiels des modifications physiopathologiques de la maladie de Parkinson.
• Métabolomique. Des taux réduits de palmitoyléthanolamide ont été observés dans la plaque chez les patients atteints de la maladie de Parkinson, ainsi que des taux réduits de carnitine chez les patients présentant un handicap avancé et des troubles cognitifs légers. Le palmitoyléthanolamide est un amide d'acide gras endogène largement étudié dans les maladies neurodégénératives.
• Artefact: Des niveaux élevés de docosanamide ont été détectés, mais ils ont été considérés comme étant dus à une contamination externe et n'ont pas été considérés comme un marqueur fiable.

Importance de l'étude

L’étude a identifié un lien potentiel entre les changements dans la composition du microbiote et le profil métabolique du revêtement de la langue, ce qui peut influencer de manière significative la pathogenèse et la progression de la maladie de Parkinson.

L'imagerie des plaques a déjà été utilisée pour détecter les maladies bucco-dentaires et gastro-intestinales, la polyarthrite rhumatoïde, la pneumonie, le cancer du poumon, l'insuffisance rénale chronique, les maladies cardiaques, l'ostéoporose et les accidents vasculaires cérébraux ischémiques. Pour la première fois, l'étude actuelle se concentre sur la composition des modifications des plaques linguales chez les patients atteints de la maladie de Parkinson, offrant ainsi un aperçu moléculaire de la pathogenèse.

Les modifications du microbiote de la plaque étaient similaires à celles observées pour les échantillons de selles de patients atteints de la maladie de Parkinson. Le prélèvement de plaque linguale est plus pratique, plus propre et plus sûr que le prélèvement de selles, ce qui souligne encore davantage les avantages de cette approche.

Parmi les changements métaboliques, les plus significatifs ont été une augmentation de certains composés exogènes et une diminution du palmitoyléthanolamide endogène, indiquant l'influence de facteurs externes et internes sur l'état des patients.

La diminution du palmitoyléthanolamide dans la plaque dentaire en fait un marqueur prometteur pour différencier les patients atteints de la maladie de Parkinson de ceux qui n'en sont pas atteints. Le palmitoyléthanolamide est synthétisé par les neurones et les cellules gliales du système nerveux central. Il préserve l'intégrité de la barrière intestinale, réduit l'inflammation et la douleur, et régule le métabolisme énergétique.

La carnitine est également importante: sa diminution chez les patients présentant des stades avancés et des troubles cognitifs légers confirme les propriétés neuroprotectrices et améliorant les fonctions cognitives décrites précédemment.

Limites et perspectives

L’étude est préliminaire et basée sur un petit échantillon, une validation dans des études de cohorte plus importantes est donc nécessaire.

Le modèle Random Forest a montré une précision de près de 89 % dans la distinction entre les patients atteints de la maladie de Parkinson et les participants en bonne santé, confirmant le potentiel diagnostique du profilage métabolique des plaques.

Globalement, les résultats soulignent le potentiel du revêtement lingual comme outil non invasif et rentable pour le diagnostic et le suivi de la maladie de Parkinson. Cependant, d'autres études à grande échelle sont nécessaires pour confirmer l'utilité clinique de ces marqueurs.